Pro en détresse : et les enfants là-dedans ? par Auxi07

Je travaille en crèche depuis 10 ans. Les années passent et les conditions de travail se dégradent de plus en plus. Ce métier je l’ai choisi par vocation mais aujourd’hui, il me dégoute ou plutôt , on m’a dégouté de ce métier. La faute à qui ? Aux gestionnaires , à l’Etat , à la rentabilité !!!

Comment prendre soin et être à l’écoute de chaque enfant lorsque vous en avez 20 dans un espace restreint avec 2 professionnels ? Et encore , une fois j’étais seule avec 18 enfants !!

Décloisonner on vous répond, décloisonner comment ? Quand les locaux sont trop petits, que vous n’êtes pas assez nombreuses pour surveiller tout le monde et que l’on vous en demande toujours plus (sorties, activités, désinfection…). Et je ne parle pas des parents qui se déchargent de leur rôle, qui vous amènent l’enfant malade avec du paracétamol avant de venir. On peut en faire des formations sur la bientraitance , le bien-être, en théorie cela fait rêver mais la réalité du terrain et toute autre… Les arrêts de travail ne sont pas remplacés (et sont de plus en plus nombreux).

C’est cela le bien être de l’enfant? le faire évoluer dans une sorte de poulailler (pardonnez-moi l’expression)? Des enfants qui sont irritables , énervés , agressifs et je les comprends. Non le bonheur n’est pas dans la crèche. La rentabilité a pris le pas sur la bientraitance . Et je ne parle même pas du salaire de misère et des disparités entre fonction publique ( hospitalière , territoriale ou le privée). Pour être bien traitant ,il faut être bien traité ! Et si les enfants étaient en mesure d’expliquer ce qu’ils ressentent dans ces conditions d’accueil… Il leur faut faire preuve d’une grande résilience.

L’usine par bo

Le témoignage « Ni bien traitée, ni bien traitante » dit absolument TOUT !
J’en viens juste à rêver désormais, que les parents découvrent ce qu’il se passe vraiment dans les multi accueil depuis quelques années.
Pire. Que quelque chose de grave arrive, pour qu’enfin le grand public en prenne conscience.
Oui, j’en suis là.
Les élus et dirigeants sont, eux, forcément déjà au courant…

Au fait, aujourd’hui nous étions 2 pour 13 bébés (10 semaines à 10mois). Deux.
Je vous laisse imaginer les conditions, pour les enfants ET les adultes.
On m’a demandée, au cours de cette même journée, de faire 1h supplémentaire. De ménage.
(J’ai refusé).
Nous ne sommes que lundi…

1000premiersjours par Maï

Aujourd’hui, on nous demande d’être constamment bienveillants, a l’écoute des enfants, des parents, de respecter leur rythme de sommeil, de repas. On nous demande de donner à manger aux bébés dans les bras ( Transat, chaises hautes interdites), on nous demande d’accueillir 12 enfants mais parfois 14 pour deux professionnelles, qui doivent gérer la préparation des repas, l’hygiène des locaux, les activités, les sorties a l’extérieur, l’hygiène des enfants, les rythmes des siestes, la surveillance de ses siestes mais aussi l’endormissement de ses enfants ( qui s’endorment de moins en moins seuls), tout ça dans un poste de 7h ( heures supplémentaires interdites ou à justifier ).
On nous demande de ne plus parler entre adultes, on ne doit plus créer de liens avec nos collègues. On mange dans une  » salle de pause » qui fait aussi office de Buanderie, tablette face au mur.
En fait, on nous demande de devenir des robots une fois entrées dans la structure. Tout ça pour un SMIC.
J’aimais mon boulot quand j’ai passé mon diplôme il y a 7 ans. C’était une vocation, aujourd’hui je déprime rien qu’à l’idée d’aller travailler, je déprime car je voulais tellement faire ce métier que je ne me voyais pas faire autre chose.
A plus de 30 ans, je suis malheureusement dans l’obligation de tout recommencer de zéro… Tout ça parce que, les personnes qui font les lois oublient les réalités du terrain…

Lettre au ministre de l’éducation nationale

Monsieur le ministre,
Je me tourne vers vous pour vous faire part d une situation incompréhensible pour moi qui suis professionnelle de la petite enfance.
Je suis agent territoriale, je travaille en tant qu’éducatrice de jeunes enfants et plus particulièrement je suis responsable dans ma structure (EAJE) de l’accueil des enfants en situation de handicap.
Depuis 2008, la structure accueille des enfants en situation de handicap. Depuis 2008, elle s’efforce de les accompagner avec bienveillance et de manière adaptée aux enfants en prenant en compte leur spécificité.
Chaque fin d année nous accompagnons les familles dans leurs démarches et nous participons au rencontre d équipe éducative qui se déroule aux seins des écoles, pour préparer au mieux la rentrée de ces enfants et nous proposons même de continuer à accueillir les enfants dans notre structure ( dérogation) le temps qu ils aient une AVS ou une structure adaptée qui les accueillent. Mais aujourd’hui, Monsieur le Ministre, 3 familles sont venues nous voir désespérées pour nous dire qu’elles étaient obligées de scolariser leurs enfants. Ces enfants, Monsieur le Ministre, ne peuvent être dans une classe de 30 élèves avec seulement 2 adultes même sur un temps réduit, ils ne peuvent suivre le programme demandé, ils ne peuvent se poser en temps de regroupement et apprendre aujourd’hui les jours de la semaine ou tout simplement la socialisation que nous leur demandons en petite section.
Bien au contraire, en leur imposant cela nous allons à l’inverse de leur développement, à l’inverse de la bienveillance que vous souhaitez dans notre éducation nationale.
Monsieur le Ministre, je suis pour l’école obligatoire afin de défendre l’égalité l’équité et le droit à l’éducation pour tous. Je suis pour l’inclusion mais je ne suis pas pour le coûte que coûte. Je suis pour l’égalité des chances mais pas pour la maltraitance.
Je vous fais cet écrit en toute modestie sans jugement aucun mais avec beaucoup de tristesse et de peur pour ces enfants.
Ce n’est que le fruit de mon investissement auprès de ces enfants qui me fait vous écrire et mon incompréhension face à ce qui se passe aujourd’hui.
Je n’attend pas de réponse je me doute que vous avez des sujets plus urgent à traiter. Mais voilà, si par chance vous me lisez et si par chance cela vous interroge je suis sur que vous trouverez face à vous des professionnels qui seront ravis d échanger avec vous et de faire avancer ce sujet.

Vous remerciant du temps prit pour me lire, je vous pris d agréer, Monsieur le Ministre, l’expression de mes sincères salutations

Ni bien traitée ni bien traitante par AP écœurée

La situation dans les multi-accueil n’a fait que se dégrader ces dix dernières années, qui peut le nier ?
Il est impossible d’offrir un mode de garde de qualité à bas coûts. Les enfants, les professionnels et les familles paient le prix de ces économies. Moins de personnel et moins de moyens pour plus d’enfants, un « taux de remplissage » qui doit plafonner, de 7h30 à 18h30, car c’est évident tout le personnel est présent sur 11h d’amplitude..
Les arrêts maladie sont incessants, les recrutements sont tardifs, aujourd’hui le quotidien c’est bidouiller les horaires, les plannings, tenir des taux d’encadrement sur le fil du rasoir. Organiser une sortie, une activité ? Presque impensable, le personnel n’est pas suffisant ce jour-là.. comme tous les autres en fait !
Le travail effectué n’est en aucun cas un travail de qualité. Le personnel n’est pas bien traité, comment peut-il être bien traitant ? Comment être bien traitant quand on demande sans cesse aux enfants d’attendre, attendre car on n’est pas disponible, attendre car on est seule pour un trop grand nombre, attendre pour répondre à leurs besoins. Fondamentaux. Quand on ne leur demande pas d’attendre, on leur demande de se dépêcher. Mais comment vont grandir ces enfants entourés d’adultes qui vont à 100 à l’heure ? Les équipes sont démotivées, découragées, plus personne ne se veut moteur de projet. Parce que personne ne peut se projeter. Comment se projeter, quand on ne sait déjà pas comment la structure va tourner la semaine d’après ? Entre les arrêts, les remplacements, les imprévus… Aucune continuité auprès des enfants n’est possible. Les demandes de la hiérarchie sont irréalistes et complètement déconnectées de la réalité du terrain. On arrive à peine à faire le minimum. Le minimum, ce n’est pas ça qu’on veut pour les enfants. Les parents sont interpellés par les conditions d’accueil et nos conditions de travail.
Jusqu’où cela ira-t-il ? Beaucoup seront parties avant de le voir, car aujourd’hui, une grande partie des professionnels de la Petite Enfance souhaite la quitter, cette Petite Enfance.

Les pros ne sont pas des pieuvres par Magali

De retour dans le secteur de la petite enfance après 3 ans, je suis effarée de la banalisation du manque de moyens apportés aux professionnels pour faire un travail de qualité.
La maltraitance est institutionnelle mais cela a forcément des conséquences sur le développement de l’enfant.
J’observe des enfants qui ont beaucoup de mal à fixer leur attention, notamment sur les temps de rassemblement
Des enfants qui fuient le regard…
Un manque crucial de temps de réunions pour améliorer la qualité d’accueil, les projets individuels, tenir des locaux qui permettent d’assurer la sécurité physique et l’équilibre psychique des enfants et des professionnels
Les enfants ,adultes en devenir ….? Ou adultes destructurés?
« Les pros ne sont pas des pieuvres….seulement 2 bras » !!!

EJE référente technique par Vio

Pendant presque 5 ans, j’ai tout donné que cela soit auprès des enfants, des familles et des équipes. Je ne comptais pas mes heures car je crois en l’importance de notre travail. Avec la gestionnaire, les choses se sont compliquées au fil des années.
Je trouve dommageable que la majorité des professionnels auprès des enfants soient si peu formé. Personnellement, j’ai fait mon maximum pour être dans la transmission de savoir, éveiller leur curiosité,… Mais sur les 2 équipes, seulement 2 avaient un réel désir d’apprendre et de bien faire auprès des enfants. Et je les en remercie.
Il est d’autant plus difficile de motiver les équipes avec zéro moyen. J’achetais de ma poche du matériel pour les 2 micro-crèches. Mais ce n’est pas une solution.
Le désinvestissement de la gestionnaire à aggraver la situation tant au niveau des embauches (énorme turnover car les équipes s’usent en accumulant toujours plus d’heures supplémentaires, face au manque de moyens, etc.) et son côté lunatique auprès des pros n’aidait en rien.
Les casquettes à tenir sur une journée vont de faire respecter les protocoles cuisine, réchauffer les plats, laver le linge, faire le ménage tout en tentant d’accompagner les enfants dans leur développement, en leur proposant un lieu de vie sécure tant émotionnellement, que psychiquement, ce à quoi s’ajoute l’accompagnement dans leurs explorations, expérimentations,…
Mais comment tout faire avec si peu de moyen et encore moins de reconnaissance ?
Nous ne sommes pas des garderies qui auraient pour objectif de dépanner les parents allant travailler.
La petite enfance est un champ riche de possible mais faut-il que l’on nous en donne les moyens, que les pouvoirs publics entendent que nous faisons un travail d’utilité publique! Les jeunes enfants bien pris en charge, bien accompagnés partiront du bon pied dans leur vie future. Moins d’argent à sortir des poches de l’Etat plus tard, s’il nous permettait de faire correctement notre travail. C’est toute la politique de la petite enfance qui est à revoir.
Dans des pays comme l’Allemagne, les enfants sont accompagnés au quotidien par des équipes constituées quasiment exclusivement d’éducateurs de jeunes enfants. Avec des salaires tenant comptent des diplômes, de la non simplicité du travail, et des responsabilités qui leur incombent.
Nous travaillons avec de l’humain, entre humain sans soupape. Mais avec toujours des questions de rendement, de taux de remplissage qui flottent au dessus de nos têtes. Il faut arrêter de penser en terme de CA mais se mettre au niveau des enfants, répondre à leurs besoins, les accompagner, faire qu’ils se sentent bien,… Et là alors l’aventure peut démarrer avec du matériel, des équipes qui se questionnent, réfléchissent ensemble à des solutions à proposer, à faire des bilans réguliers sur chaque enfant pour améliorer les propositions. Avoir de vrais moyens, pour penser l’espace. Trouver des solutions pour lutter contre l’usure professionnelle.
Dans ma promo, nous étions 40, 1/3 l’ai encore mais ça va continuer de s’égrainer.
Sur un plan, plus personnel, je me suis formée en plus du DEEJE en passant un Master2R en sciences de l’éducation. Mais aucun employeur ne voit l’atout que cela peut-être pour eux et quand ils le voient, ils disent « on vous embauche pour votre diplôme d’EJE car c’est celui-ci dont on a besoin pour ouvrir ». Donc je prends légalement tout les risques, payée au lance pierre, avec des équipes peu ou pas formées auxquelles je dois faire pleinement confiance…. problème…
J’ai fini en burnout.
Au fil des années :

  • j’ai vu des enfants mis au coin car « super nounou » le fait… oui mais non, c’est contre productif à cet âge et de là j’argumentais sans grand succès les fois suivantes surtout quand j’étais sur l’autre micro-crèche ;
  • j’ai observé des douces violences même après une journée pédagogique sur le sujet ;
  • j’ai vu des enfants humiliés par les adultes (chose q je reprenais encore et encore) ;
  • j’ai été victime de harcèlement de la part de pros qui ne sont là que pour la paye, se contentent du minimum et ne veulent rien entendre;
  • Des temps de sieste anarchique sans pro auprès des enfants pour qu’elles puissent manger entre elles, forcément quand je passais la porte ça dégénérait mais avant tout je m’étais un stop et demandait à l’une d’elle qui n’avait rien à faire en pause de venir avec moi pour accompagner les enfants dans leur sommeil.
    Des exemples, j’en ai des charrettes avec des situations de gravité diverses.
    Mais là, je souhaitais juste dire qu’effectivement la petite enfance est en péril. Et nous avons besoin d’une refonte de tout ça TRES RAPIDEMENT, en concertation avec les acteurs, les chercheurs, …

Mauvaises conditions par Enfant = futur

J’exerce mon métier au sein d’un multi accueil pour une entreprise depuis plus de quinze ans et ce que je constate c’est le manque de professionnels, et les délais de recrutement et d’embauche sont très longs. Il manque toujours du personnel et les groupes d’enfants sont au complet, alors ça engendre une double charge de travail pour le personnel, ça conduit à l’épuisement et à la dégradation des conditions de travail. En effet je ne compte plus les situations dans lesquelles j’ai dû me débrouiller (seule avec 17 enfants) pour contenir des groupes en nombre supérieur au quota légal (1), notamment au moment de l’accueil des parents et de leurs enfants lors des ouvertures et des siestes.
Ces mauvaises conditions de travail sont sources de fatigue et d’épuisement à la fois physique et psychique. Le sous-effectif permanent est préjudiciable ; il cause des dysfonctionnements car il impose une adaptation permanente, plus de flexibilité, plus de fatigue etc. de la part des professionnels. Les situations de sous effectif perdurent de façon anormale sur des longues périodes ; les recrutements sont tardifs et les démissions sont rapides et fréquentes ; on nous dit qu’il y a peu de candidats et que les bas salaires sont la cause principale des démissions.
On ne peut imaginer par ailleurs que ce sous-effectif chronique puisse être un choix de stratégie, comme un levier de rentabilité, car il ferait prendre un risque important. (il faut réexpliquer sans cesse le fonctionnement, rassurer les enfants et les parents…) Imaginez la prise en charge des enfants ! Je suis constamment dans la surveillance et non dans une position d’observer, de rassurer…
La politique devrait d’ailleurs prendre conscience de la réalité sur le terrain et répondre à ce problème.

(1) cf. article R2324-43-1 du Code de la santé publique : “Pour des raisons de sécurité, l’effectif du personnel encadrant directement les enfants ne peut pas être inférieur à deux, dont, pour les établissements et services d’une capacité supérieure à vingt places, au moins un des professionnels mentionnés au 1° de l’article R. 2324-42.”

Auxiliaire de puériculture par Boubou35

Mon métier est l’un des plus beau au monde même s’il devient de plus en plus difficile. Et il le sera encore plus avec cette réforme bidon que veut mettre en place ce ministre qui ose répondre dans une lettre qui ne changera pas d’avis sans trouver aucun compromis.
Monsieur le secrétaire,
votre 1ere mission doit être le bien être et la bienveillance de ces tous petits.
Comment pouvez vous être aussi indifférent et méprisant pour ce métier que vous voulez à tout prix dégrader ?
Sortez de votre bureau et venez sur le terrain vous confrontez à la réalité !
Vous vous pensez argent, nous on pense bien-être voilà ce qui est scandaleux.
Nous contribuons à l’éducation de ces enfants qui sont notre avenir dans une société qui est déjà très compliquée.
Alors n’en rajouter pas avec des réformes aussi stupides.

On veut de la bienveillance par Alexmimi91

Ca va faire 15 ans que je suis dans le milieu de la petite enfance.
Souvent le même constat ces derniers années : sous-effectif, taux d’encadrement élevé, un travail souvent à la chaîne.
Tu es occupée à faire un change avec un plan de travail ouvert sur la section mais n’étant pas auprès des enfants aux sols du coup souvent des chamailleries. Tu gères aussi le nettoyage des tables sols après la fin des repas et du coup, là encore, ils ont personne avec eux les changes à la chaine, pas le temps pour des activités manuelles plus encadrées comme la peinture.
Il faut vraiment arriver à se détacher de la situation et lâcher prise sinon on peux vite se rendre malade de travailler dans ces conditions. Une année, j’ai fini limite en burnout dans une structure.