Voilà 30 ans que je suis Educatrice de Jeunes Enfants et depuis 28 ans, responsable d’une crèche parentale dans le sud ouest…
Bien des choses ont changé en positif sur la reconnaissance de l’enfant en tant qu’être à part entière, mais avec le temps, l’organisation d’accueil et de gestion se précisant,
la gestion a pris le pas sur l’accueil et bientôt on ne parlera plus d’enfants mais du coût de la place de chaque enfant.
Pour moi, le plus difficile est cette pandémie car, j’ai l’impression d’avoir fait un retour 40 ans en arrière, les crèches hygiénistes, ou l’enfant était un objet.
Je n’ai pas supporté que l’on passe sous silence, l’obligation du masque pour les professionnel-le-s, en crèche, quelle descente aux enfers, comment peut-on régresser ainsi,
annuler toutes ces observations sur les touts petits, le besoin de regarder un visage, dans son ensemble, pour qu’ils puissent se construire face à un adulte bienveillant et
communiquant. Je refuse d’entendre que l’enfant s’adapte et reconnait son monde « même avec le masque »…oui, mais avec quels sacrifices et incompréhensions, quels ressentis ?
Nous marchons sur la tête et je ne reconnais plus ce travail, auprès des touts petits, que j’aimais tant.
J’ai beau passer outre les protocoles inutiles et ridicules, je me demande où l’on va ainsi et que va t’on apporter aux enfants, dans les années à venir,
puisque l’enfant redevient un objet de marchandage et qu’on ne cherche pas son bien-être mais juste à ce qu’il rentre dans une case ou une autre….
ça n’a plus rien à voir avec le métier que j’avais choisi, qui avait la particularité de se représenter l’enfant dans sa globalité, dans son unicité, dans sa cellule familiale,
dans son environnement et notre rôle étant de l’accompagner dans la construction de sa personnalité. J’ai toujours choisi la souplesse à la rigidité, mais cette souplesse est de plus en plus difficile à maintenir et malgré tout, ce qui ne change pas c’est que nous devons, nous professionnels, nous adapter aux changements qui n’arrêtent pas de « changer » et qui restreignent les « possibilités de créer, d’envisager, d’espérer…
Alors cette nouvelle réforme sur la Petite Enfance, ne me dit rien qui vaille, elle serait merveilleuse, si elle pouvait être validée par la profession et non par des bureaucrates qui oublient de mettre l’enfant au centre de leurs décisions.