J’étais bien naïve par AnonymeDePlus

En arrivant dans le milieu de la petite enfance je pensais naïvement, probablement comme notre ministre, que le travail serait douceur, tendresse, amusement, etc… La réalité est plus rude. Dès 7h30, c’est la course. Si l’on a la chance de n’avoir pas encore d’enfants, il faut tout de même courir pour préparer les dortoirs, bibonneries, salles de change, sections, activités, et bien entendu tout l’administratif qui nous est délégué (même si l’on est payé au smic, on fait du boulot de bureau).Quand les enfants arrivent, il faut commencer à gongler avec tous les foutus quotas stupides et impossibles.Nous sommes deux en sections, nous avons 12 enfants, mais 3 doivent être changés, puis couchés.L’un d’eux doit être endormi dans les bras (si, si, c’est la charte de bienveillance, et les nouvelles réglementations de la petite enfance qui veulent qu’on s’adapte à chaque besoin particulier, donc Mr le ministre, ne commencez pas à dire « bah oui, mais si vous endormez tout le monde à bras, aussi…. » ni le fameux « ben oui, mais si les parents font pas d’efforts…. ») Oui, mais voilà, même si je suis très rapide pour les changes, même si les enfants présents aujourd’hui sont miraculeusement sages et ne se tapent pas dessus ou ne tombent pas, ne se blessent pas ni ne sont malades, ma collègue reste seule avec 11 enfants le temps que je change le premier. pourtant, nous sommes dans les quotas… 2 adultes pour 12 enfants, soit 1 adulte pour 6, nous devrions même être LARGEMENT capables de gérer. D’ailleurs, la direction nous fait savoir qu’en « canalisant » le groupe, cela devrait être gérable. On ne peut pas canaliser de la même manière des enfants de 6mois et des enfants de 2 ans. même à 12 enfants, une telle différence d’âge est handicapante pour « canaliser » le groupe.Mais la journée passe, et le reste de l’équipe arrive.Le reste des enfants aussi. Je ne parle pas des difficultés sociales ou psychologiques des familles qui peuvent nous impacter et dont on  ne peut pas prendre le temps de s’occuper car nous manquons de temps.N’oubliez pas, Mr le ministre, nous sommes dans la petite enfance, le premier lien d’une famille vers l’extéreur.C’est nous qui pouvons apporter de l’aide à une famille en situation malsaine ou de violence. donnez nous le temps d’écouter les familles. De 10h à 16h, l’équipe ne soufflera que pendant la pause repas, calculée avec la precision de l’aéronautique, au risque de nous mettre en difficulté. Les enfants souffrent de cette tension complète jusqu’à ce que nous puissions dire au revoir aux premières arrivées.Les dernières devront s’occuper du ménage des sol, structures de mobilités, tapis, jouets, draps, tétines, pyjamas, turbulettes, le tout en rendant les enfants aux parents, détaillant autant que possible la journée de chacun des 23 enfants accueillis chaque jours.Pour nous aider, toute la journée, nous avons pris en note, changes, soins, heures de sommeil, repas, activités, état physique et psychique, progrès de développement.Pour chacun des 23 enfants. nous sommes 6 aujourd’hui dans mon équipe. Nous avons longtemps fonctionné à 4 ou 5. Ce qui, même les jours où il y a moins d’enfants, ne nous aide pas à l’organisation. Je vous épargne les vomis ramassés, les lavages de nez, les traitements à donner, les repas difficiles pour les enfants qui ne mangent pas, l’organisation des repas en fonction des habitudes alimentaires, les soins des bobo, la discipline, les calins, les consolations, les berceuses et bercements, et les regards aux collègues qui parfois ont besoins d’aide, et parfois ne peuvent pas venir nous aider lorsque nous avons besoin.

    J’aime mon travail. De tout mon cœur. Mais je sais avec certitude, et je crois Mr le ministre rester fort humble lorsque je dis que j’ai plus de connaissance que vous n’en aurez jamais à ce sujet, je sais comment améliorer la législation de la petite enfance. Et ce n’est certainement pas de la manière dont vous le faites. J’entends votre volonté de réformer les lois pour permettre d’augmenter les capacités d’accueil et les profits qui suivront. Mais l’enfant n’est pas un produit, et nous ne sommes pas des machines. Nos conditions de travail sont déjà loin d’être optimales. Nous avons tout juste le temps de faire des câlins aux enfants alors que c’est la base (si, si, la base, afin d’offrir un cadre sécure à l’enfant) et vous nous demandez d’accueillir plus d’enfants avec moins de moyens. Vous vous moquez du monde. La France a détruit l’hôpital, a détruit les EPHAD, et maintenant, elle s’en prend à la petite enfance. Renoncez à cette folie, ou marquez l’histoire par votre ignominie.