Bonjour, je travaille en crèche depuis 43 ans. J’ai connu les enfants déshabillés et passés par un guichet.
Heureusement à l’époque, une amélioration des conditions d’accueil a eu lieu.
En premier grâce à Jeanne Levi qui a sorti les enfants des lits et de leur privation de mouvements.
Les parents ont commencé à rentrer, les psychologue à avoir leurs places, les auxiliaires et les EJE aussi.
L’enfant est devenu une personne, avec des droits.
On a mis en place des principes Pikleriens, la référence, la motricité libre, les jeux en libres accès…
Seulement voilà, tout cela a un coût. Tout cela demande du personnel qualifié.
Tout cela demande de l’espace.
Tout cela demande du temps, de la bienveillance, des compétences.
Et non, il ne suffit pas d’être une femme pour travailler en crèche. Aujourd’hui, il faut remplir, coûte que coûte. Partager les lits, alors que même à la Sanacotra chaque adulte à son lit. On essaye d’économiser pour tout. Seulement cet argent économisé aujourd’hui, combien va t il coûter à la collectivité de demain ?
On touche aux fondamentaux et aux fondations des jeunes enfants, ce qui ne manquera pas d’ébranler les adultes qu’ils deviendront.
Aujourd’hui, on maltraite les professionnels, on les paye au lance pierre, on les manage sans bienveillance.
Comment demander à des professionnels d’être bien traitants si eux-mêmes ne sont pas bien traités. Quoi de mieux que de l’avoir ressenti et vécu soi-même, pour comprendre ce que c’est réellement !.
J’ai connu le harcèlement de ma hiérarchie, la méconnaissance des besoins d un jeune enfant, la maltraitance institutionnel. Sylvaine Giampino dit que la prévention, ce sont les petits détails…
Aujourd’hui, on n’en est pas là, plus là?
Et pourtant, j espère avoir semé des graines, donner de la bienveillance, éveiller des professionnels à la curiosité, ouvert des fenêtres, plantée des rhizomes, soutenir des équipes, accompagner des familles, des enfants avec toujours autant de motivations, mais à quel prix ???
Une usure du corps. Beaucoup de temps et de patience. Je suis triste de voir aujourd’hui, alors que les neurosciences viennent confirmer l’importance de tout ce travail, une dégradation des modes d’accueil, des formations….que les travaux du groupe de réflexion des 1000 jours ne soient pas écouter.
Que les professionnels de la petite enfance soit aussi sages et ne se révoltent pas plus. Qu’allons nous laisser à nos enfants ? J’ai honte.