Moi, maltraitante par Lisa

Alors que deux collègues sont absentes depuis deux semaines sans être remplacées, nous courons dans tous les sens pour réussir à faire l’essentiel. Coucher les enfants, les faire manger, les changer. Mais aujourd’hui je suis à bout.

Les enfants sont très énervés, ils sont toujours aussi nombreux, toujours entassés dans cette même pièce de vie, si on peut appeler ça ainsi, moi je dirai plutôt que c’est un grand couloir. Ils crient, se chamaillent, mais nous avons à peine le temps de résoudre les conflits. C’est l’heure des départs. Une professionnelle enchaîne les transmissions aux parents. Une autre a pris un groupe d’enfants dans le dortoir avec des legos pour tenter d’apaiser l’ambiance. Moi, je m’active à changer les dernières couches et vérifier que tout les enfants sont bien débarbouillés du goûter. J’entends des parents s’agacer car leur enfant a le nez tout sale. Je me dépêche encore plus car je sais que bientôt Louisa va partir et que sa couche est pleine. Mais la priorité, c’est Dorian qui a fait une selle depuis une demi-heure que je n’arrive pas à changer. Il s’amuse de me voir courir et voudrait jouer mais je n’ai pas le temps. Au bout de quelques demandes pour qu’il vienne avec moi, je m’impatiente et le préviens que je viens le chercher. Il s’en va en courant dans la direction opposée. Je l’attrape alors par le bras et l’entraîne dans ma direction, ses pieds ne touchent plus le sol car il se laisse alors traîner en pleurant. À bout de nerfs je le tire ainsi jusqu’à la salle de change, il n’y a pas de temps à perdre.
Dorian se plaindra ensuite pendant deux jours de son bras.
C’était il y a quatre ans maintenant, mais je m’en veux encore. Jamais, je n’aurai pensé pouvoir avoir ce genre de pratiques maltraitantes. Je ne me l’excuserai jamais, mais je sais que jamais il n’y aurai eu ce genre de pratiques si nous avions été en nombre suffisant pour s’occuper des enfants.