est-ce qu’il reste un espoir ? par vert dodu

Histoire d’un vieux con,
En 2004, j’arrive sur cette ville, l’élue me reçoit (une dame cette élue en commission, elle offre les sandwichs, derrière son air de bourgeoise, une militante), m’installe dans son bureau, me parle de la ville et me fait prendre conscience de l’endroit où je viens d’arriver un an plus tôt en tant qu’habitant et usager. Me voilà aujourd’hui « agent de la ville », elle m’offre un livre qui retrace l’histoire de notre ville… Je suis fier et heureux, je me sens bien avec une pression positive sur les épaules. 33 ans et une envie folle d’ouvrir ce multi accueil que l’on vient de me confier. Quelques mois auparavant, je suis reçu suite à une candidature spontanée par S. du service petite enfance :

  • vous avez déjà dirigé une crèche ?
  • non
  • vous savez ce qu’est un multi accueil ?
  • non
  • vous savez quel projet vous voulez mettre en place ?
  • non…je veux juste participer au recrutement et faire ça avec les collègues
  • Bon Ok, on vous prend !
    Une erreur administrative, une méconnaissance de leur part fait que je débute le 2 janvier 2004….le multi accueil ouvrira en aout 2004. Le service assume son erreur, ne me balade pas de crèche en crèche, me laisse libre de construire le projet, de recruter, d’aller à la rencontre de projets similaires dans notre département et ailleurs. Je suis soutenu, porté. Je fais une bourde : ce n’est pas grave on me reçoit, on m’explique et on me soutient.
    La petite enfance fait alors partie de la direction de l’enfance, de la petite enfance et de la jeunesse. Une famille qui se réunit au moins une fois par an autour d’un barbecue et d’une soirée dansante. N., D. et P. ne me connaissent pas, mais me prennent dans leur bras, me font danser…je suis accueilli, je compte pour elles, je compte pour la ville, je prends ma place doucement. Je sais où je suis.

Le service s’étoffe, normal les besoins des familles sont colossaux et l’idée de devenir une direction fait son chemin……début de la fin. Réorganisation à gogo, bras armés installés…ça va faire mal.
2009, première salve d’agression. En réunion de direction, la « responsable » m’insulte (juste parce qu’avec une collègue nous avions demandé si les budgets « culture » sucrés pour les relais en 2008 seraient remis en place en 2009) …dans l’assistance aucune réaction : la stupeur peut être, la lâcheté sans doute. Je comprends ce jour-là ce que va devenir la petite enfance…la famille éclate. Je sors, je fonce dans le bureau de la grande chef…aucune suite ne sera donnée.
Mes congés parentaux qui découpent mon parcours me recentrent, me redonnent espoir et envie de revenir pour partager avec les familles, les enfants, mon équipe.
2010, la direction voit le jour. C’était censé apporter stabilité, sens du travail, définition de valeurs communes, comme si avant tout ça n’existait pas.
Sauf qu’avant ces valeurs nous les vivions, nous ne faisions pas qu’en parler pour faire semblant.
Depuis cette création, la violence ne cesse de grandir, de manière insidieuse, doucement mais sûrement.
2011, une nouvelle aventure écrite dans un autre multi accueil, replié sur nous-mêmes pour bien faire notre travail. Mon idée permanente, protéger mon équipe pour qu’elle assure ses missions en toute sérénité. Cela épuise de prendre des coups.
10 années viennent de passer, la violence institutionnelle monte en puissance entre caresses dans le dos et injonctions paradoxales.
Feuilles de route de 2021 : communication, soutien managérial et optimisation ! Quel programme !
Depuis 2016, un projet me tient debout, celui de faire une MAM. Le service public va mal (je ne me bas même plus pour lui – honte à moi j’ai quand même un père syndicaliste bordel), la petite enfance est partie en sucette depuis bien longtemps (2008/2009 avec la directive service dite Bolkenstein). La MAM, alors que j’y étais opposé en 2009, devient pour moi et beaucoup de pros de la petite enfance, un moyen qui va permettre de travailler en respectant des valeurs avec l’idée de travailler de manière horizontale dans une belle anarchie qui ne peut qu’être positive pour le public accueilli.
Un projet pour revivre, reprendre la main, ne s’occuper que des enfants et de leur famille. Travailler avec et pas contre, être choisi pour un projet. Sortir des chiffres et vivre le bonheur d’une nouvelle rencontre.
Il reste un espoir… mais faut être fort pour y croire !